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Publications by [http://fr.wikipedia.org/wiki/Catherine_Baker Catherine Baker]:
Publications by [http://fr.wikipedia.org/wiki/Catherine_Baker Catherine Baker]:


[http://tahin-party.org/textes/baker.pdf Pourquoi faudrait-il punir? (2004, 192 pages)] argues for the abolition of the prison system.
==== Manifeste Abolitionniste (1984) ====


Another online access is [https://www.academia.edu/4056800/Baker_Sur_l_abolition_du_syst%C3%A8me_p%C3%A9nal here].
*[http://abolition.prisons.free.fr/manifeste.html Manifeste Abolitionniste (1984)]
 
'''MANIFESTE ABOLITIONNISTE'''
 
Les principes qui ont fondé la prison étaient des principes philanthropiques : le délinquant, pendant son incarcération allait réfléchir, s’amender, se régénérer. L’histoire a eu raison de ces pénibles calembredaines. On ne peut bâtir l’utopie que sur une absolue rigueur intellectuelle, or l’emprisonnement repose sur « l’espoir que ça ira mieux après », c’est-à-dire sur rien d’intelligible.
 
Le mot « réinsertion » était une expression assez divertissante mais qui n’amuse même plus les élèves de l’École nationale de l’Administration pénitentiaire ; il serait au moins temps d’en trouver une autre, de préférence aussi cocasse.
 
Ce n’est pas le lieu ici de répéter ces évidences : l’incarcération rend fou, rend malade, rend dur et avide. Personne jamais n’a relevé le défi de dire le contraire.
 
Et nul ne désire vivre dans un monde que d’aucuns, en prenant le risque d’enfermer des hommes, rendent plus menaçant encore qu’il ne l’est.
 
Dans la plupart des pays, les criminologues, sachant qu’elle est profondément nuisible, tentent de plus en plus d’éviter la prison aux « petits délinquants » ; ce n’est certes pas par bonté d’âme.
 
A fortiori, il est primordial d’éviter l’emprisonnement aux « vrais » délinquants.
 
C’est pourquoi ces lignes ne sont pas une prise de position intellectuelle (ce que nous pensons n’a rien d’original) mais un appel à agir concrètement à quelques-uns pour l’abolition des prisons en inventant les moyens de notre action.
 
Nous ne sommes pas des dames d’œuvre ; nous ne croyons pas, en nous attaquant à la prison, soulager les misères du monde ni contrebalancer la bestialité de la multitude par une attitude « humaine ».
 
Nous ne sommes pas des humanistes. L’Homme n’existe pas et nous sommes tous communément des canailles.
 
La prison est un symbole, nous voulons dire un signe de reconnaissance pour des gens horrifiés d’instinct de ce à quoi on nous condamne.
 
Mais les prisons sont aussi des choses réelles accablantes pour l’esprit, insupportables à la raison et qui doivent disparaître, simplement parce que c’est logique.
 
Le discours sur une prison qui protégerait les braves gens des malfaiteurs est le plus facile à débusquer de tous les mensonges. On peut commencer par celui-là pour la joie de l’esprit : on comprendra mieux ainsi le rôle de la justice, de la police et finalement de la société tout entière.
 
La prison sécurise le plus grand nombre à trop bon compte et entraîne chacun à se départir du moindre bon sens. La prison est indispensable au maintien de l’ordre parce que l’ordre maintient la prison. Voilà pourquoi la prison est indispensable au maintien de la prison.
 
Le réformisme n’est pas, à proprement parler, idiot, mais impossible : moins la prison punit, moins elle répond à sa vocation. Reprocher à la prison d’être trop pénible, c’est reprocher à un hôpital de trop bien soigner.
 
Il y a une question intéressante qu’on nous pose souvent de siècle en siècle : « Vous parlez de supprimer la torture mais par quoi donc allez-vous la remplacer pour extorquer les aveux utiles à la société ? » Cette question est une bonne question. Nos réponses ne seront jamais assez bonnes pour ce genre de bonne question. Aussi demandons-nous humblement une autre formulation du problème.
 
En attendant, nous ne voyons aucun intérêt à faire durer l’état actuel des choses qui n’est pas un pis-aller mais le pire.
 
Nous avons beaucoup moins à perdre à ouvrir les prisons que les autoroutes et tout à gagner en sérénité, en intelligence, en désir de réfléchir à plusieurs aux moyens de vivre à plusieurs.
 
Et c’est urgent.
 
Les courtes peines sont une mise à l’écart temporaire, inepte en soi. Mais les longues peines sont des peines éliminatoires voulues comme telles par la justice et la société : on « coupe le membre gangrené », on « arrache la mauvaise herbe », on « procède à la dératisation », autant de délicats euphémismes pour exprimer la volonté collective d’élimination, de meurtre.
 
Si l’on écoutait la foule, beaucoup de ceux qu’on envoie en prison seraient brûlés sur des grils, écorchés vifs avant d’être écartelés. Nous n’avons pas à composer avec la barbarie. Nous ne pactisons pas avec ceux qui ont le goût de la souffrance et de la mort en transigeant sur le moyen terme que serait l’emprisonnement. Parce que nous aimons la vie. (Quand nous ne l’aimons plus, nous l’estimons encore assez pour la quitter volontairement.)
 
Nous ne laisserons personne parler d’êtres « récupérables » ou « irrécupérables » ; le monde n’est cette décharge d’ordure que pour les esprits orduriers.
 
Au mieux, nous excluons l’idée d’opinion(s) publique(s) ; au pire, nous affirmons que le propre des opinions publiques supposées est de se laisser manipuler par ceux à qui ça profite. Quant à nous, nous ne désespérons pas de voir des individus se rallier à nos positions lorsqu’ils se seront fait leur propre idée sur la question.
 
En jouant le jeu d’un partage absurde entre coupables et innocents, la justice, par la pratique de l’emprisonnement, nous scie en deux et nous interdit de rechercher notre unité ; en renforçant les structures mentales normatives les plus rigides, elle fait de nous des agents mécaniques. Nous ne tolérons pas que la société, sous son avatar judiciaire, nous accule ainsi à la démence et en prenne prétexte pour exercer « naturellement » sa tutelle sur nous.
 
Nous n’aimons pas les taulards parce qu’ils sont des taulards. Les taulards ne sont pas plus aimables en tant que tels que les femmes, les juifs, les enfants ou les écrivains. Mais nous aimons certains individus qui ont aussi, entre autres caractéristiques, d’être écrivains ou enfants ou juifs ou femmes ou taulards.
 
Nous ne supportons pas d’être enfermés. Ni dedans ni dehors. Nous, les « innocents », n’avons pas plus le droit d’entrer dans les taules que les détenus d’en sortir. Même remarque pour la censure de notre courrier. Nous ne recevons pas la plupart des journaux écrits à l’intérieur des oubliettes, ils nous sont interdits.
 
Ce n’est pas « par respect des droits de l’Homme » que nous refusons l’enfermement. Nous ne souffrons pas davantage qu’on attache les chiens à la niche ou qu’on mette les singes en cage. Cela n’est pas une parenthèse.
 
Nous combattons toute alternative à la prison qui serait aussi un enfermement « à l’extérieur » comme par exemple un contrôle social plus raffiné encore qu’aujourd’hui.
 
Nous ne prétendons pas savoir ce qu’est la liberté mais nous percevons assez clairement et distinctement ce qu’est l’oppression et ce qui nous empêche d’être nous-mêmes.
 
Nous avons besoin de présenter de l’intérêt les uns pour les autres, donc nous ne pouvons accepter d’être assujettis ni pris en otage par quelque personne ou groupe que ce soit.
 
Nous nous opposons à toute institutionnalisation de la force, qu’elle vienne des caïds de tous ordres, des maffiosi, de la famille, du peuple, des mâles, de l’État, etc.
 
Nous ne reconnaissons à personne le droit ni de nous juger ni de juger nos actes.
 
Nous avons tous les droits.
 
Le Droit n’existe pas. Il est une vision pessimiste mais néanmoins fausse de ce que sont les rapports entre nous. Il est sans aucun intérêt d’interdire par exemple le viol, mais hautement intéressant au contraire d’imaginer comment éviter d’être violeur ou violé.
 
Le crime en soi n’existe pas ; si l’on prend au hasard un acte cauchemardesque et révoltant (comme un employeur qui me vole mon temps, ma vie), nous ne dirons pas qu’il faut éliminer le criminel mais que chacun a intérêt à renverser les choses, à comprendre ce qui se passe et à résister à la force. Rien ne s’oppose d’ailleurs à ce que des gens qui mutuellement s’apprécient ne réfléchissent ensemble aux moyens de se garder de toute atteinte à leur intégrité mentale ou physique.
 
Nous ne sommes pas complices des tribunaux qui condamnent en notre nom. Il s’agit là d’une usurpation qui est une fois de plus un coup d’État.
 
Cela ne saurait nous empêcher de garder chacun la possibilité d’un jugement ou d’une indignation mais la société n’a pas à se charger de nos indignations individuelles.
 
Nous ne sommes pas de gauche. Nous ne sommes pas davantage anarchistes, ni de droite, ni des parallélépipèdes, ni n’importe quoi de ce genre. Nous sommes opportunistes si cela nous semble utile. Nous savons ce que nous voulons.
 
Nous, abolitionnistes, sommes réalistes – si l’on veut bien par « réalistes » ne pas entendre « experts à avaler toutes les couleuvres du sordide aujourd’hui » – mais « décidés à réaliser nos idées ».
 
Catherine Baker
 
==== Pourqoi faudrait-il punir? ====
 
*[http://tahin-party.org/textes/baker.pdf Pourquoi faudrait-il punir? (2004, 192 pages)] argues for the abolition of the prison system.
 
*[https://www.academia.edu/4056800/Baker_Sur_l_abolition_du_syst%C3%A8me_p%C3%A9nal Pourquoi faudrait-il punir?].


[[Datei:Catherine-Baker 187.jpeg|250px|thumb|right|Catherine Baker]]
[[Datei:Catherine-Baker 187.jpeg|250px|thumb|right|Catherine Baker]]


[http://www.google.de/imgres?imgurl=http://www.babelio.com/users/AVT_Catherine-Baker_187.jpeg&imgrefurl=http://www.babelio.com/auteur/Catherine-Baker/99138&h=526&w=350&tbnid=2NIPmCDaqRBfgM:&zoom=1&tbnh=90&tbnw=60&usg=__ZhgTfrs2Ma4XXxeEoZXOLGIgMG8=&docid=yyZfEjcA--RZ0M Baker (*16.07.1947, Lille) draws on the work of Louk Hulsman's].  
[http://www.google.de/imgres?imgurl=http://www.babelio.com/users/AVT_Catherine-Baker_187.jpeg&imgrefurl=http://www.babelio.com/auteur/Catherine-Baker/99138&h=526&w=350&tbnid=2NIPmCDaqRBfgM:&zoom=1&tbnh=90&tbnw=60&usg=__ZhgTfrs2Ma4XXxeEoZXOLGIgMG8=&docid=yyZfEjcA--RZ0M Baker (*16.07.1947, Lille), inspired by the work of Louk Hulsman].  


The first pages of her book against punishment:


'''POURQUOI FAUDRAIT-IL PUNIR ?'''
'''POURQUOI FAUDRAIT-IL PUNIR ?'''
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beaucoup avancé depuis.
beaucoup avancé depuis.
J’entends bien que les victimes réclament la punition du
J’entends bien que les victimes réclament la punition du
coupable
coupable.
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On verra que les abolitionnistes insistent particulière-
On verra que les abolitionnistes insistent particulière-
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autrement nous échappe, comme il échappe très souvent aussi
autrement nous échappe, comme il échappe très souvent aussi
dans la réalité à la compréhension du criminel.
dans la réalité à la compréhension du criminel.
2
 
Le châtiment s’ancre dans l’histoire la plus archaïque de l’hu-
Le châtiment s’ancre dans l’histoire la plus archaïque de l’hu-
manité, celle des terreurs religieuses que les hommes ont traduites
manité, celle des terreurs religieuses que les hommes ont traduites
en dieux et déesses au cœur démoniaque. L’enfer chrétien n’a rien
en dieux et déesses au cœur démoniaque. L’enfer chrétien n’a rien
à envier à l’enfer hindou
à envier à l’enfer hindou et l’affirmation d’un sentiment de
3
culpabilité proprement judéo-chrétien n’est que l’aveu d’une inculture crasse. En Occident, la condamnation terrible de la faute
et l’affirmation d’un sentiment de
culpabilité proprement judéo-chrétien n’est que l’aveu d’une
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1 Nous nous accordons cette licence, nous écrivons je chaque fois qu’avec
une certaine familiarité, nous serions tentée de faire quelque aparté du
genre « je pense, personnellement...».
 
2 Quand nous écrivons les mots « délinquant », « criminel », « voleur », etc.,
nous les employons toujours pour désigner des personnes qui se désignent
comme telles. Ou bien nous précisons avec des adjectifs tels que « supposé ».
 
3 Les damnés y « sont bouillis, broyés, grillés, sciés en petits morceaux »
écrit, par exemple, Séverine Auffret dans
Aspects du Paradis, Arléa, 2001.
 
inculture crasse. En Occident, la condamnation terrible de la faute
lors d’un jugement de l’âme après la mort s’enracine dans le culte
lors d’un jugement de l’âme après la mort s’enracine dans le culte
orphique, introduit en Grèce entre le  
orphique, introduit en Grèce entre le  
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entretiens sur la colère. Si elle n’évite pas les fautes à venir,
entretiens sur la colère. Si elle n’évite pas les fautes à venir,
dit-il, la pun
dit-il, la pun
ition n’a aucun sens
ition n’a aucun sens. Par la suite, des penseurs
1
. Par la suite, des penseurs
allemands se montreront offusqués d’une telle vision utilitariste.
allemands se montreront offusqués d’une telle vision utilitariste.
La punition ne doit servir à rien. Rien qu’à punir. Et on se l’est
La punition ne doit servir à rien. Rien qu’à punir. Et on se l’est
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vous accueille » ou « La Loi rend libre » ou « C’est au père d’incarner
vous accueille » ou « La Loi rend libre » ou « C’est au père d’incarner
l’image de la Loi », il convient de le reprendre et de lui faire dire
l’image de la Loi », il convient de le reprendre et de lui faire dire
1 Lettres à Lucilius. De la colère. XIX 7.


« la Loi donc la punition » ; c’est moins majestueux mais plus clair.
« la Loi donc la punition » ; c’est moins majestueux mais plus clair.
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» que l’on traduit habituellement
» que l’on traduit habituellement
par « excès de justice, excès d’injustice », traduction que je trouve
par « excès de justice, excès d’injustice », traduction que je trouve
tendancieuse ; je proposerais « Justice parfaite, parfaite injustice »
tendancieuse ; je proposerais « Justice parfaite, parfaite injustice » certaines de faire leurs choux gras d’une récession qui ne
 
1 En Arabie comme aux États-Unis, en France comme en
Chine, l’heure est à une répression de plus en plus brutale.
Sans compter que l’emprisonnement à but lucratif a de beaux
jours devant lui. Les entreprises privées qui ont acheté des
parts dans ce marché sont pleinement satisfaites. Même si
l’économie mondiale s’effondrait, elles seraient absolument
 
1 Mot à mot : « Au plus haut de la justice, le plus haut de l’injustice ».
 
certaines de faire leurs choux gras d’une récession qui ne
pourrait que rendre les pauvres plus délinquants et les riches
pourrait que rendre les pauvres plus délinquants et les riches
plus répressifs.
plus répressifs.
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d’attaques de banques depuis que partout se sont sophistiqués
d’attaques de banques depuis que partout se sont sophistiqués
les moyens de protection et moins de cambriolages pour les
les moyens de protection et moins de cambriolages pour les
mêmes raisons. Assurément les systèmes techniques de dissua-
mêmes raisons.
sion sont bien plus efficaces que les pendaisons, poings coupés
 
 
1 Cf. Julie Le Quang Sang, La loi et le bourreau : la peine de mort en débat 1870-1985, L’Harmattan, 2001.


=== Michel Onfray et al. (2014): Manifesto for the abolition of every prison ===
=== Michel Onfray et al. (2014): Manifesto for the abolition of every prison ===
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